LES ÉVADÉS de FRANK DARABONT (1994)

Publié le 17 Juin 2011

Dans les années 40, condamné à perpétuité pour le double meurtre de sa femme et de l'amant de celle-ci, un jeune banquier réservé se lie d'amitié avec un vieux taulard. Une émouvante histoire d'amitié derrière les barreaux, doublée d'une ode magnifique à l'espoir.

En 1947, Andy Dufresne, un jeune banquier, est condamné à la prison à vie pour le double meurtre de sa femme et de l'amant de celle-ci. Ayant beau clamer son innocence, il est alors transféré à la prison de Shawshank, le pénitencier le plus sévère de l'État du Maine, dirigé d'une main de fer par l'implacable directeur Norton et son adjoint, le brutal capitaine Hadley. Les conditions de vie y sont d'autant plus pénibles pour Andy qu'il est bientôt victime d'agressions, lesquelles deviennent de plus en plus fréquentes et violentes au fil du temps. Il surmonte pourtant peu à peu les épreuves et se lie d'amitié avec Red, un vétéran désabusé de Shawshank, détenu depuis 20 ans...

Avis:

Pour sa première réalisation, le cinéaste Frank Darabont frappait - déjà !... - très fort avec ce très beau THE SHAWSHANK REDEMPTION adapté d'une nouvelle de Stephen King, et plus connu en France sous le titre LES ÉVADÉS (titre d'ailleurs extrêmement décrié et jugé médiocre et stupide - ce qui en même temps n'est pas tout à fait faux... - dans la mesure où il dévoile d'emblée ce que Darabont s'est forcé de nous cacher pour mieux nous surprendre avec plus tard... titre pourtant assez joli si on l'interprète différemment, dans le sens métaphorique du terme où il semble en fait traduire l'évasion de l'esprit pratiquée par les deux personnages principaux...). Lauréat de nombreuses nominations et récompenses (très justement méritées, d'ailleurs !), LES ÉVADÉS fut pourtant un cuisant échec commercial lors de sa sortie en salles, en 1994, et ce malgré des critiques alors (déjà ?...) plus que positives. Ce n'est qu'une fois sorti en vidéo - et sans doute grâce aussi, par la suite, à ses multiples rediffusions sur le petit écran - qu'il a peu à peu acquis son statut de film culte et incontournable, figurant désormais en bonne place dans les listes consacrant les meilleurs films de tous les temps... paradoxal, non ?... Mais comme on dit, ce sont les années qui font la postérité... et non l'inverse. Belle revanche en tout cas pour un film qui a été, en son temps, injustement boudé et sous-estimé et est passé quelque peu inaperçu. S'ouvrant sur un procès (ou plutôt sur un verdict), l'histoire des ÉVADÉS se situe à la fin des années 40 (en 1947, plus précisément) et narre le parcours d'Andy Dufresne, un jeune banquier réservé, doublement condamné à la prison pour les meurtres de sa femme et de l'amant de cette dernière, et incarcéré à Shawshank, le pénitencier le plus sévère de l'État du Maine. Très vite, on comprend que la question principale de l'intrigue n'est pas tant de savoir si - oui ou non - Andy est coupable, mais plutôt si il va survivre à cet effroyable endroit, où les détenus finissent par se construire eux-mêmes leur propre prison intérieure à l'intérieur même de la prison qui les retient et leur ôte tout souvenir du monde extérieur; à l'image du vieux Brooks (interprété par James Whitmore), libéré au bout de cinquante ans de détention et qui se retrouve alors dans un monde qu'il a jadis connu mais qui a depuis bien changé, et auquel il sera incapable de s'adapter, connaissant une fin plus tragique encore que ne pouvait l'être son enfermement entre quatre murs. S'étalant sur près d'une vingtaine d'années, le récit suit l'évolution d'Andy (lequel fera bientôt montre de ses talents de banquier, blanchissant notamment l'argent pas toujours très net du directeur du pénitencier; devenant ainsi ironiquement - comme il le dira justement lui-même - un hors-la-loi en prison, après avoir été honnête durant toute sa vie en liberté !...), et s'attache à dépeindre les rapports amicaux très forts qui vont peu à peu se tisser entre Andy et un vieux taulard, Red, vétéran de Shawshank, détenu depuis vingt ans; et qui deviendra au fil du temps le meilleur ami d'Andy, bien que les deux hommes aient des caractères radicalement différents et ne partagent pas toujours les mêmes idées. Chacun transformera ainsi la vie de l'autre. Résumé ainsi, le synopsis peut sembler un rien classique: quoi d'original en effet dans l'histoire de deux détenus qui vont devenir amis ?... C'est sans compter sur le génie de Frank Darabont pour donner de la profondeur et de la richesse à une histoire en vérité beaucoup plus captivante et surprenante qu'il n'y paraît; une histoire qui parle d'amitié, de rédemption, de justice, de liberté (liberté du corps, mais surtout, liberté de l'esprit...), d'évasion (évasion de l'esprit et, par la suite, du corps...); une histoire qui parle avant tout, et surtout, d'espoir. "L'espoir", affirme Andy, "est une chose en nous que rien ne peut atteindre" ("Même à Shawshank, on n'enferme pas l'espoir", peut-on lire sur l'affiche qui vous est présentée en haut de page). Ce à quoi Red rétorque: "L'espoir, c'est dangereux. L'espoir peut rendre un homme fou"; et à quoi Andy répondra plus tard: "Je crois que tout se résume en un simple choix: dépêche-toi de vivre ou dépêche-toi de mourir". Hymne à la liberté, hymne à la vie, hymne à l'espérance, LES ÉVADÉS est aussi une réflexion quasi philosophique sur la prison et sur la force de l'amitié derrière les barreaux; mais dont la véritable réussite réside dans le fait d'avoir su dépeindre - de manière très réaliste, et sans aucune complaisance - l'horreur (au propre comme au figuré) et la langueur de l'enfermement; et, par dessus tout, la longueur du temps qui passe, et qui semble s'écouler incroyablement plus lentement pour des taulards; qui doivent alors absolument, comme le dit très justement Red, s'occuper l'esprit, de n'importe quelle manière que ce soit; afin de ne pas sombrer dans la folie de l'attente interminable de la liberté ("Shawshank", dira encore Red, "on vous y enferme pour la vie: c'est justement ce qu'ils vous prennent..."). Sobre et sans artifices, la mise en scène de Darabont maintient et accroît habilement l'intérêt du spectateur du début jusqu'à la fin, aidée en cela par une musique émouvante et particulièrement inspirée de Thomas Newman; et transcendée par une interprétation lumineuse, de très grande qualité et d'une vive intensité. En tête d'affiche, le formidable et très charismatique tandem Tim Robbins/Morgan Freeman fonctionne à merveille, se donnant la réplique avec un plaisir communicatif et livrant chacun une prestation puissante; démontrant qu'ils sont tous deux littéralement habités par leurs personnages (ô combien attachants, au passage !), leur insufflant cette pointe infinie d'humanité qui les caractérisent tout au long de l'histoire et les distinguent des autres détenus; lesquels sont respectivement interprétés par William Sadler et Gil Bellows (entre autres). On retiendra également les brillantes compositions de Bob Gunton, parfaitement cynique en directeur de prison implacable et obtus (pour reprendre les mots d'Andy !); et de Clancy Brown, machiavélique à souhait sous les traits d'un gardien sadique et assez peu aimable. Œuvre phare et emblématique du cinéma américain des années 90, LES ÉVADÉS s'impose aujourd'hui comme une référence majeure du 7e Art pour tout cinéphile qui se respecte. Cinq ans après ce film, son réalisateur retrouvera de nouveau le milieu carcéral et l'univers de Stephen King pour les besoins de LA LIGNE VERTE, avec Tom Hanks.



Rédigé par kleinhase

Publié dans #CINÉMA, #FILMS, #FILMS DES ANNÉES 1990, #En détail

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K
quelle citique ! merci
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K
Voilà un film qui est un véritable chef d'oeuvre. L'amitié, le courage, se côtoient en permanence. Les convictions profondes de l'un arriveront doucement à convaincre celui qui ne croit plus à rien. Ce cheminement est superbement interprèté par les 2 acteurs . Cest une ode à l'espoir et à la liberté. Le dernier quart d'heure est très fort en émotion lorsque M Freeman ose s'évader pour aller chercher cette boîte cachée en dessous d'une pierre ....La il trouvera cette "vrai clé" qui lui donnera la liberté....Sa liberté.Tout simplement superbe..
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E
Voilà un film que l'on pourrait qualifier de superbe, mais qui a été ignoré par les critiques et le public très mystérieusement. Pourtant quel beau message transmis et surtout quelle belle interprétation par ces acteurs extraordinaires. Tout est parfait, le rythme, les couleurs, les images, la musique, qui touchent le spectateur de façon émouvante.... La fin du film est très poignante. Un film que l'on aime revoir et qui émeut à chaque fois......
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I
Pour moi, c'est LE meilleur film de Darabont! Vu, revu, et re-revu... mais je le trouve toujours aussi poignant! Le rôle de Whitmore fait prendre conscience de ceux qui ont la chance de sortir mais qu'à la fois, c'est parfois trop tard... "Brookes was here"
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D
Tout simplement dans mon Top 5 !
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S
GreatThe best movie I have ever watched
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